La maladie de Crohn, pathologie inflammatoire invalidante de l’intestin, serait associée à un défaut de production d’un acide gras essentiel, révèlent des chercheurs de l’Inserm.
En France, 120.000 personnes souffrent de la maladie de Crohn, qui se caractérise par des inflammations de la paroi d’une partie du tube digestif (généralement l’intestin, le côlon ou le rectum). Les patients souffrent de douleurs abdominales, de diarrhées, de fatigues voire de pertes d’appétit et de poids. Les origines de cette maladie restent mal connues. Un gène de prédisposition de la maladie de Crohn a déjà été identifié (une ou deux mutations sur le gène NOD2/CARD15 peut multiplier par 40 le risque de développer la maladie) et le tabac reconnu comme facteur aggravant. Une équipe française de l’Inserm a récemment découvert que cette pathologie est aussi liée à un défaut de production par l’intestin d’un acide gras essentiel, chargé de réguler la perméabilité de la barrière intestinale. Ils précisent dans leur étude, publiée dans Gastroenterology, que cet acide gras pourrait devenir une cible de choix dans l’élaboration de nouveaux traitements contre la maladie de Crohn.
Les acides gras, essentiels au système nerveux de l’intestin
Les chercheurs de l’Inserm se sont intéressés au système nerveux de l’intestin (situé tout le long du tube digestif) qui, comme le cerveau, possède des neurones et des cellules gliales. Ces dernières, chez le rat comme chez l’humain, libèrent des acides gras, les 15-HETE, qui renforcent la barrière intestinale et assurent son imperméabilité. Or, les scientifiques ont découvert que les patients atteints de la maladie de Crohn ne produisent pas ces molécules, ce qui rend leur barrière intestinale particulièrement perméable aux agents pathogènes (voir schéma ci-dessous). Ceci contribuerait aux rechutes de la maladie ou à sa sévérité. « Ces résultats permettent à la fois de renforcer le rôle des cellules gliales en particulier et du système nerveux de l’intestin en général dans les processus physiopathologiques de la maladie de Crohn et aussi d’identifier de nouvelles cibles d’intérêt thérapeutique« , concluent Camille Pochard et Sabrina Coquelorge, les 2 premières auteures de l’étude. Cette dernière fournit également la preuve que les acides gras sont aussi essentiels au système nerveux de l’intestin.
En temps normal, les cellules gliales de l’intestin produisent des dérivés lipidiques dont la 15-HETE qui renforce l’étanchéité de la barrière épithéliale intestinale et empêche le passage de pathogènes (en vert sur le schéma ci-dessus). Au cours de la maladie de Crohn, il existe un déficit de production gliale de 15-HETE qui conduit à une augmentation de la perméabilité de la barrière et facilite le passage de pathogènes (en rouge sur le schéma ci-dessus).
*Source : Étude publiée dans Gastroenterology